Faire équipe pour améliorer les traitements liés au cancer du sein grâce à une nouvelle approche
Traiter sans chirurgie : l’objectif ultime qu’espèrent réaliser des radio-oncologues du CUSM et de HMR
Une patiente qui reçoit un diagnostic de cancer du sein de grade 1 ou 2 subit généralement une intervention chirurgicale, suivie de séances quotidiennes de radiothérapie commençant un mois plus tard. En plus de nécessiter entre 5 et 20 visites à l’hôpital, selon le protocole établi dans chaque centre hospitalier, ces traitements laissent des traces sur la zone irradiée, qui peut devenir plus dure, se rétrécir ou se déformer.
Le Dr Tarek Hijal du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) et le Dr Michael Yassa de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR) ont mis au point une nouvelle approche de soins visant à réduire la durée du traitement, les visites à l'hôpital et les effets secondaires, et à améliorer les résultats esthétiques. Cette approche, qui consiste à donner aux patientes admissibles une dose unique de radiothérapie avant l’opération, a été testée dans deux essais cliniques réalisés avec des femmes de plus de 60 ans ayant un cancer du sein à faible risque. Ceux-ci ont donné des résultats positifs, qui ont été publiés en septembre 2024 dans le prestigieux journal Radiotherapy and Oncology (The Green Journal). Un troisième essai est en cours, dans lequel les patientes sont suivies durant un an après la radiothérapie afin de vérifier si la tumeur a suffisamment rétréci pour éviter la chirurgie, ou permettre une procédure moins invasive.

« Nos résultats sont en train de guider le développement d’un protocole assez révolutionnaire, dit le Dr Hijal, radio-oncologue, chercheur au sein du programme de recherche sur le cancer de l’Institut de recherche du CUSM et directeur de la Division de radio-oncologie du CUSM. Il faudra encore du temps et des études plus larges pour confirmer les résultats à plus long terme, mais sur la base des résultats encourageants déjà obtenus, nous avons bon espoir de pouvoir alléger les traitements et améliorer les résultats esthétiques pour les femmes ayant des cancers de sein à faible risque. »
« Notre approche pourrait réduire le besoin de traitements plus longs ou de chirurgies plus invasives, tout en étant plus pratique pour les patientes, notamment celles vivant dans des régions éloignées des centres de traitement. Tout cela, avec le double avantage de réduire la pression sur le système de santé, » ajoute le Dr Yassa, radio-oncologue à l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont et chercheur au Centre de recherche de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont.
En effet, réduire la durée des traitements et le recours à la chirurgie pour les nouveaux diagnostics de cancer du sein — qui auraient possiblement touché plus de 30 000 femmes au Canada en 2024, selon la Société canadienne du cancer — permettrait non seulement d’améliorer l’expérience des personnes sous traitement, mais réduirait également le fardeau pour le système de santé, qui peine à répondre aux besoins de la population en matière de chirurgie.
À propos des études
Étude SPORT-CK, menée au CUSM entre octobre 2016 et juillet 2022
- 25 patientes de 60 ans et plus atteintes d’un cancer du sein à faible risque (grades 1-2, ER+, Her2-; âge médian de 67 ans) ont reçu une dose unique de radiothérapie préopératoire suivie d’une chirurgie dans les 72 heures. Le suivi médian des patientes s’est échelonné sur 60 mois.
- Résultats :
- Aucune complication chirurgicale majeure, des effets secondaires minimes, et un bon résultat esthétique pour presque toutes les patientes.
- Aucun cas de récidive n’a été observé après 5 ans. Des études supplémentaires sont nécessaires pour confirmer ces résultats à long terme.
- Référence : Dima Mahmoud, Michael Yassa, Leticia Alvarado, Christine Lambert, Sarkis Meterissian, Dawn Anderson, Francine Tremblay, Naim Otaky, John Keyserlingk, Valerie Panet-Raymond, Neil Kopek, Marc David, Marie Duclos, Catherine Pembroke, David Fleiszer, Ari N Meguerditchian, Antoine Loutfi, Danny Lavigne, Tarek Hijal, Single pre-operative radiation therapy (SPORT-CK) trial for low-risk breast cancer: Early results of a phase 2 study, Radiotherapy and Oncology, Volume 200, 2024, 110510, ISSN 0167-8140.
https://doi.org/10.1016/j.radonc.2024.110510
Étude SPORT-DS, menée à l’HMR entre juin 2018 et décembre 2019
- 13 patientes de 65 ans et plus atteintes d’un cancer du sein à faible risque (grade 1-2, ER+, Her2-; âge médian de 71 ans) ont reçu une dose unique de radiothérapie préopératoire suivie d’une chirurgie trois mois plus tard. Le suivi médian des patientes s’est échelonné sur 48,5 mois.
- Résultats :
- 85 % des patientes ont vu leur tumeur rétrécir, avec des effets secondaires minimes comme des réactions cutanées légères et des douleurs mammaires.
- Une patiente a eu une disparition complète de la tumeur.
- Après 3 ans, 60 % des patientes ont jugé leur résultat esthétique comme bon ou excellent.
- Le moment de la chirurgie n’a pas été jugé optimal, à cause de l’inflammation causée par la radiothérapie présente à ce moment.
- Référence : Danny Lavigne, Tarek Hijal, Peter Vavassis, Marie-Christine Guilbert, Lucas Sideris, Pierre Dubé, Mai-Kim Gervais, Guy Leblanc, Michel-Pierre Dufresne, David Nguyen, David Tiberi, Dima Mahmoud, Michael Yassa, Single preoperative radiation therapy with delayed surgery for low-risk breast cancer: Oncologic outcome, toxicity and cosmesis of the SPORT-DS phase I trial, Radiotherapy and Oncology, Volume 200, 2024, 110515, ISSN 0167-8140.