Une nouvelle étude établit des liens entre la pollution atmosphérique et la santé pulmonaire au Canada
Des chercheurs de l’IR-CUSM démontrent que l'exposition à des niveaux relativement faibles de pollution atmosphérique au Canada est associée à une fonction respiratoire plus faible et à la MPOC.
Montréal, le 26 mai 2022 – La maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC), qui rend la respiration difficile et réduit la fonction respiratoire de plus de deux millions de personnes au Canada et de centaines de millions dans le monde, a une prévalence accrue dans les populations exposées à long terme à la pollution atmosphérique. Alors que la plupart des études sur le sujet ont porté sur des régions où les niveaux de pollution étaient élevés, un réseau de recherche canadien dirigé par des scientifiques de l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) a décidé d'examiner la situation au Canada. Selon leurs travaux de recherche, même l'exposition à de faibles concentrations de pollution de l'air extérieur est associée à une baisse de la fonction respiratoire chez les adultes, c'est-à-dire la capacité des poumons à échanger de l'oxygène et du dioxyde de carbone par la respiration. Leurs résultats montrent également que les personnes ayant des poumons « dysanaptiques » - caractérisés par une inadéquation développementale de la taille des voies respiratoires par rapport à celle des poumons - pourraient être plus sensibles aux effets à long terme de la pollution atmosphérique sur la fonction respiratoire et la MPOC. Publiée dans l'American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine, leur étude est la première à examiner ces associations dans la population canadienne.
« Peu d'études ont examiné la relation entre la pollution atmosphérique et la santé pulmonaire des adultes dans les régions où les concentrations de pollution atmosphérique sont faibles, comme au Canada », explique le Dr Jean Bourbeau, scientifique principal du programme de recherche translationnelle sur les maladies respiratoires (RESP) à l'IR-CUSM, professeur au département de médecine de l'Université McGill et auteur principal de cette publication. « Notre étude montre que même dans ce contexte, l'exposition à long terme à la pollution de l'air extérieur a des effets négatifs importants sur la fonction respiratoire. Nous avons vu que de petites augmentations de la pollution atmosphérique par les particules fines et le dioxyde d'azote entraînaient des diminutions notables sur le plan clinique de la fonction respiratoire. »
Structure pulmonaire, pollution atmosphérique et MPOC
L'équipe de chercheurs ne s'est pas contentée d'examiner comment la pollution atmosphérique affectait la santé pulmonaire de la population canadienne. Elle a également évalué comment la vulnérabilité d'une personne aux problèmes pulmonaires peut être influencée par la structure de ses poumons. Elle a constaté que les personnes ayant des voies respiratoires plus petites avaient une fonction respiratoire plus faible et étaient 87 % plus susceptibles de développer une MPOC que les personnes ayant des voies respiratoires plus larges, et une exposition similaire à la pollution atmosphérique.
« Pour la première fois, il a été démontré que des différences communes dans la structure des poumons, qui apparaissent tôt dans la vie, augmentent la susceptibilité aux effets nocifs de la pollution atmosphérique plus tard dans la vie », déclare l'auteur de l'étude, Dany Doiron, Ph. D., associé de recherche à l’IR-CUSM.
« Nos résultats suggèrent qu'une proportion relativement importante de la population canadienne est particulièrement sensible aux polluants atmosphériques inhalés », ajoute le Dr Benjamin Smith, coauteur de l'étude, scientifique au sein du programme de recherche translationnelle sur les maladies respiratoires (RESP) à l’IR-CUSM et professeur agrégé au département de médecine de l'Université McGill. « Alors qu'il a été démontré que l'exposition à la pollution atmosphérique pendant l'enfance a des effets négatifs sur la fonction et le développement pulmonaires, notre étude suggère que le développement des poumons au début de la vie pourrait à son tour, à l'âge adulte, contribuer à les protéger ou, inversement, à augmenter leur susceptibilité à la MPOC et à des réductions de la fonction respiratoire induites par la pollution de l’air ambiant. »
Comprendre les facteurs de risque de la MPOC
La maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) est une cause importante d'hospitalisation au Canada et une cause majeure de décès. Elle se caractérise par une inflammation et une obstruction partielle des voies respiratoires dans les poumons, rendant la respiration difficile.
Si la fumée de tabac est le facteur de risque le plus connu de la MPOC, jusqu'à la moitié des cas de MPOC dans le monde sont attribuables à d'autres facteurs de risque, comme des expositions professionnelles, des maladies infectieuses, des événements survenus au début de la vie et la pollution atmosphérique - en particulier, les particules fines et le dioxyde d'azote. Les particules fines sont constituées de petites particules inhalables trente fois plus petites que la largeur d'un cheveu humain, et elles peuvent pénétrer profondément dans les voies respiratoires. Les principales sources de particules fines sont les émissions industrielles, la fumée des feux de forêt, le chauffage au bois résidentiel, la cuisson, l'agriculture et la circulation automobile. Quant au dioxyde d'azote, il résulte de la combustion d'énergies fossiles et est un indicateur de la pollution atmosphérique liée au trafic. En septembre 2021, compte tenu des dommages que la pollution atmosphérique inflige à la santé humaine, l'Organisation mondiale de la Santé a publié de nouvelles lignes directrices sur la qualité de l'air, recommandant des réductions importantes de ces deux types de polluants.
D'autres études récentes ont également montré que des voies respiratoires plus petites par rapport à la taille des poumons constituent un autre facteur de risque majeur de la MPOC, même chez les personnes qui n'ont jamais fumé. Cependant, à ce jour, l'interaction entre la pollution atmosphérique et cette affection appelée dysanapsie était encore inconnue.
Une étude transversale basée sur les données de l'étude CanCOLD
Pour effectuer son analyse, l'équipe de recherche a utilisé les données de santé de l'étude Canadian Cohort of Obstructive Lung Disease (CanCOLD), codirigée par le Dr Bourbeau à l’IR-CUSM et à l'Université McGill, et la Dre Wan-Cheng Tan de l'Université de la Colombie-Britannique. La cohorte de l’étude CanCOLD comprend 1 500 personnes âgées de 40 ans et plus provenant de neuf villes canadiennes différentes. Les données sur la pollution de l'air ambiant ont été fournies par le Consortium canadien de recherche en santé environnementale urbaine (CANUE).
Pour mesurer la fonction respiratoire, les participants à l'étude CanCOLD ont subi des tests de spirométrie, un test simple qui mesure la quantité d'air pouvant être expirée en une seule inspiration forcée. Des examens de tomodensitométrie (CT scan) ont été utilisés pour déterminer la taille des voies respiratoires d'une personne par rapport à la taille de ses poumons. Les facteurs de risque liés au mode de vie et au comportement ont été évalués à l'aide de questionnaires, et des méthodes validées ont été utilisées pour estimer les concentrations de pollution atmosphérique au lieu de résidence de chaque participant. Les chercheurs ont également pris en compte des facteurs individuels tels que l'âge, le sexe, la taille, le statut socio-économique, la consommation de tabac et son intensité, l'exposition à la fumée de tabac et de combustion de biomasse, et la prise de médicaments respiratoires.
« En identifiant les personnes plus sensibles aux polluants atmosphériques, notre étude fournit des renseignements utiles à la gestion clinique des maladies respiratoires chroniques, déclare le Dr Bourbeau. Nos résultats confirment que même de faibles niveaux de pollution atmosphérique ne doivent pas être considérés comme sans danger. »
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À propos de l’étude
Lire l’article dans le journal American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine
Les auteurs remercient les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC, subvention # 453225) et GlaxoSmithKline (étude # 213021) pour leur soutien.
Les auteurs remercient les participants à l'étude CanCOLD et les membres du groupe de recherche collaborative CanCOLD et du Réseau canadien de recherche respiratoire. Les auteurs remercient également le Consortium canadien de recherche en santé environnementale urbaine (CANUE) qui a fourni les données sur la pollution de l'air ambiant utilisées dans leur étude.
À propos de l’IR-CUSM
L’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) est un centre de recherche de réputation mondiale dans le domaine des sciences biomédicales et de la santé. Établi à Montréal, au Canada, l’institut, qui est affilié à la faculté de médecine de l’Université McGill, est l’organe de recherche du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) – dont le mandat consiste à se concentrer sur les soins complexes au sein de sa communauté. L’IR-CUSM compte plus de 450 chercheurs et environ 1 200 étudiants et stagiaires qui se consacrent à divers secteurs de la recherche fondamentale, de la recherche clinique et de la recherche en santé évaluative aux sites Glen et à l’Hôpital général de Montréal du CUSM. Ses installations de recherche offrent un environnement multidisciplinaire dynamique qui favorise la collaboration entre chercheurs et tire profit des découvertes destinées à améliorer la santé des patients tout au long de leur vie. L’IR-CUSM est soutenu en partie par le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS). ircusm.ca
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Coordonnatrice des communications, Recherche, CUSM
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