Pour accueillir toutes les saines expressions de la sexualité

De gauche à droite : Evelyn Andelfinger, Laura Copeland, Dr Richard Montoro, Dre Karine Igartua, Vicky Rochon, et Marsha Kagan.
De gauche à droite : Evelyn Andelfinger, Laura Copeland, Dr Richard Montoro, Dre Karine Igartua, Vicky Rochon, et Marsha Kagan.

Le Centre d’orientation sexuelle de l’Université McGill (COSUM) du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) est une clinique de psychiatrie primée qui, depuis son ouverture en 1999, est la seule au Québec à offrir un large éventail de services de psychothérapie spécialisés adaptés aux personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres ou allosexuelles, c’est-à-dire qui ne se définissent pas comme hétérosexuelles ou ne s’identifient pas aux catégories précédentes. Cette clientèle, aussi connue sous l’acronyme LGBT, prend contact avec la clinique pour obtenir de l’aide afin d’affronter les problèmes liés à l’orientation sexuelle et aux souffrances morales causées par la discrimination.

« Dans notre société, être gai ou transgenre n’est pas encore perçu sur le même pied que l’hétérosexualité. L’homophobie n’est pas rare. Elle est vécue tous les jours, affirme le Dr Richard Montoro, psychiatre et codirecteur de la clinique qui est située à l’Hôpital général de Montréal. Elle vient d’étrangers, mais aussi de personnes qu’on aime et en qui on devrait avoir confiance. Ce type d’attitude peut entraîner une faible estime de soi, de l’anxiété, une dépression et des pensées suicidaires, et c’est la raison d’être de notre clinique. »

Selon le Dr Montoro, l’établissement d’une relation de confiance est au cœur de tout traitement psychothérapeutique efficace. Il est donc important que tous les membres de la clinique – infirmière, secrétaire, thérapeutes ou internes – cherchent à créer un environnement où le patient se sent libre d’être lui-même.

Dr Richard Montoro et Marsha Kagan
Dr Richard Montoro, psychiatre et codirecteur du COSUM
C’est un centre unique. Les gens viennent de tous les coins de Montréal et d’aussi loin que les Territoires du Nord-Ouest pour nous consulter. Ça fait toute une différence dans la vie des patients qui, autrement, n’obtiendraient pas ce type de services.

Marsha Kagan, secrétaire
Il est important que les patients ne se sentent pas jugés lorsqu’ils arrivent ici. Nous devons être ouverts et accepter la diversité. Mon rôle consiste à accueillir gentiment les patients, que ce soit en personne ou par téléphone, et à respecter leur confidentialité.

« Les membres de la population LGBT font face à des difficultés particulières qui compliquent la création d’une relation de confiance, y compris avec les professionnels de la santé, explique la Dre Karine Igartua, psychiatre et codirectrice de la clinique. Si vous êtes Noir ou Juif, votre famille l’est probablement aussi. Puisque vos parents appartiennent à la même minorité, ils ont l’habitude de lutter contre les préjugés et peuvent vous enseigner à réagir à l’antisémitisme ou au racisme. Pour les LGBT, c’est plus compliqué. La plupart des parents sont hétérosexuels et n’ont pas été aux prises avec l’homophobie. Eux-mêmes peuvent adopter des attitudes homophobes, si bien que la maison n’est pas nécessairement un lieu sécuritaire. »

Comme le soutien familial est essentiel à la bonne santé mentale des minorités sexuelles, la clinique offre également un soutien aux parents et aux conjoints qui éprouvent de la difficulté à s’adapter à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre de leur proche.

L’explosion de la conception binaire du genre

Au fil des ans, la clientèle du COSUM a changé en fonction de l’évolution de la société occidentale, révèle la Dre Igartua.

« Il y a quinze ans, nous traitions des patients qui éprouvaient de la difficulté à dévoiler leur homosexualité. De nos jours, puisque l’acceptation sociale des gais et lesbiennes s’est améliorée, les Québécois en général révèlent plus facilement leur orientation et n’ont pas besoin de soutien psychothérapeutique pendant le processus. Nous voyons maintenant un nouveau type de clientèle, composée d’immigrants et de réfugiés de diverses cultures et confessions religieuses dans lesquelles un tabou très important pèse encore sur les diverses formes de sexualité. Nous voyons également plus de jeunes qui remettent totalement en question le concept de genre. Certains font la transition d’homme en femme ou vice-versa, et d’autres ne se reconnaissent pas dans l’un ou l’autre sexe. Certaines personnes sont créatives quant au genre et font sauter les normes de genre. Les patients peuvent présenter un mélange intentionnel de caractéristiques masculines et féminines. C’est un domaine très nouveau, encore rempli d’inconnues. C’est à la fois difficile, passionnant et enrichissant de pouvoir les aider à se sentir bien dans leur genre. »

Les Drs Igartua et Montoro aimeraient accroître leurs services cliniques grâce à des collaborations officielles avec d’autres services et d’autres établissements et à l’ajout d’un psychologue, afin de former plus de groupes de psychothérapie. Ils espèrent également que l’évolution de la clinique se poursuive à titre de centre universitaire où on effectue de la recherche, on profite des compétences de diverses spécialités et on forme d’autres professionnels.

« Nous sommes médecins, alors notre objectif premier consiste à traiter les personnes malades, précise le Dr Montoro. Nous travaillons toutefois vers un objectif ultime, celui d’aider la société à être plus équitable envers la population LGBT. »

Karine Igartua, Vicky Rochon
Dre Karine Igartua, psychiatre et codirectrice du COSUM
Nous sommes à la fine pointe des traitements auprès de la population transgenre. Nos compétences en matière d’identité sexuelle attirent des stagiaires du monde entier, notamment de l’Australie, de la Grande-Bretagne, de la Belgique, du Pakistan et du Pérou. En retour, ils apportent une perspective internationale sur notre travail.

Vicky Rochon, infirmière clinicienne
Je ne soulignerai jamais assez l’importance d’une approche non critique et calmante pour aider nos patients, qui sont généralement anxieux à l’idée d’accéder à des soins médicaux et psychiatriques. Je suis la première personne à qui ils parlent lorsqu’ils téléphonent à la clinique, et parfois la toute première personne à qui ils se confient sur leur sexualité. En plus de recueillir de l’information téléphonique sur leur situation, je dois m’assurer qu’ils se sentent assez en sécurité pour passer à l’étape suivante et nous consulter en personne. Aussi, je travaille directement avec les parents des enfants et des adolescents transgenres de la clinique.
Evelyn Andelfinger, Laura Copeland
Evelyn Andelfinger, interne, thérapie de couple et familiale
À titre d’étudiante au nouveau programme de maîtrise en thérapie de couple et familiale de l’Université McGill, je trouve important d’apprendre à connaître les besoins et problèmes particuliers qui touchent la population LGBT et leur famille et de profiter de cette expérience en qualité de thérapeute. J’espère que mon travail clinique contribue au bien-être des patients de la clinique et qu’il sera profitable à mes futurs clients. Comme interne, j’apprécie la qualité de la formation offerte au COSUM et l’approche ouverte et individualisée que préconisent les deux directeurs de la clinique.

Laura Copeland, interne, psychologie du counseling
En qualité de doctorante en psychologie du counseling à l’Université McGill, mes recherches portent sur les enfants créatifs à l’égard du genre et leur famille. Je peux utiliser ce que je comprends des recherches actuelles dans le domaine pour éclairer mon travail auprès des clients. De plus, le climat ouvert du COSUM favorise le partage de connaissances et de compétences au sein de l’équipe interdisciplinaire, ce qui se répercute positivement sur les soins aux patients.

Une clinique primée

En avril prochain, les Drs Igartua et Montoro recevront le prix May Cohen pour l’équité, la diversité et le genre de l’Association des facultés de médecine du Canada (AFMC), afin de saluer les remarquables réalisations du COSUM qui ont contribué à améliorer le contexte de la diversité et du genre dans le milieu de la médecine universitaire au Canada.

« Ce prix est une belle marque de reconnaissance», souligne la Dre Igartua. Il confirme la légitimité et l’importance de la clinique, non seulement pour les patients et leur famille, mais également pour les étudiants et les résidents LGBT. Nous avons contribué à rendre l’équité et la diversité de genre plus acceptables au sein de notre département. »

Ce n’est pas la première fois que la pertinence et les compétences de la clinique sont soulignées. En effet, l’Association des médecins psychiatres du Québec (AMPQ) a décerné le prix de la réalisation de l’année 1999 aux Drs Igartua et Montoro, tandis qu’en 2006, AMI-Québec (Agir contre la maladie mentale) a octroyé aux deux médecins le prix du psychiatre modèle pour leur formidable travail clinique.