Amélioration, responsabilisation, autonomie: Une conversation avec les physiothérapeutes qui ont pour mission de remettre sur pied les patients atteints de la COVID

(six, de gauche à droite) : Suma Das, Joe Pazienza, Patricia Barassi, Maria Pourasadi, Angelo Simonelli et Angela Di Girolamo (équipe de physio du COVID, absent : Timothy Ho)
(six, de gauche à droite) : Suma Das, Joe Pazienza, Patricia Barassi, Maria Pourasadi, Angelo Simonelli et Angela Di Girolamo (équipe de physio du COVID, absent : Timothy Ho)
Le mois de mai est le Mois national de la physiothérapie, ce qui nous donne l’occasion de rendre hommage aux physiothérapeutes du CUSM qui travaillent côte à côte avec les autres membres de l’équipe des Services multidisciplinaires afin d’assurer la prestation de soins de qualité aux patients.

Les physiothérapeutes, des professionnels de la santé titulaires d’une maîtrise, jouent un rôle important dans le traitement des blessures et des maladies, avec pour objectif ultime de ramener les patients à leur niveau de fonctionnement antérieur. La profession de physiothérapeute repose sur un processus de décision clinique qui englobe l’intégration des meilleures preuves disponibles, la propre expertise clinique du physiothérapeute et les valeurs et besoins du patient qui reçoit les soins. Ce processus de décision clinique n’a jamais été autant mis à l’épreuve que lors de la pandémie de la COVID-19. Les physiothérapeutes, comme d’autres professionnels, apprennent à connaître l’impact de la maladie sur la mobilité, le fonctionnement et le rétablissement, alors qu’ils évaluent et traitent les patients. Ils ont relevé le défi, comme le souligne cette entrevue.

Je tiens à remercier personnellement tous les physiothérapeutes du CUSM pour leur initiative, leur courage et leur leadership afin de garantir que les patients reçoivent les soins dont ils ont besoin. 

Je suis très fière et honorée de vous compter tous parmi les membres de l’équipe des Services multidisciplinaires.

Félicitations à vous tous.

Antoinette Di Re,

Directrice des Services multidisciplinaires (sites adultes), de la Mission en santé mentale et responsable de la trajectoire NSA/SAPA.

Les physiothérapeutes de l’Hôpital général de Montréal, unité COVID 18, de gauche à droite : David Cassidy, Rebecca Punjabi, Elena Mollica
Les physiothérapeutes de l’Hôpital général de Montréal, unité COVID 18, de gauche à droite : David Cassidy, Rebecca Punjabi, Elena Mollica

Nous avons virtuellement rencontré les membres de l’équipe de physiothérapie du Site Glen pour parler de leur travail avec les patients de la COVID-19. Ils ont été très généreux dans leurs réflexions, leur vision et leur passion pour leur travail en ces temps difficiles - et nous espérons que vous serez également inspirés.

Merci à toute l’équipe de physiothérapie COVID :

Patricia Barassi, Suma Das, Angela Di Girolamo, Timothy Ho, Giuseppe Pazienza, Maria Pourasadi et Angelo Simonelli.

Comment la physiothérapie aide-t-elle les patients atteints de la COVID à se rétablir ?

Notre objectif en physiothérapie en lien avec la guérison des patients atteints de la COVID est d’empêcher autant que possible le déconditionnement général. Nous avons préparé des documents contenant des exercices généraux et des recommandations utiles aux patients pour maintenir leur fonctionnement physique. Nous nous occupons d’un ensemble très spécifique de clients qui ont besoin de physiothérapie thoracique. Il s’agit de s’assurer que les voies respiratoires soient dégagées des sécrétions.

Le plus important, c’est d’évaluer et de surveiller l’activité, la tolérance et le travail de respiration des patients grâce à l’exercice et à la mobilité, afin d’informer de manière appropriée les équipes médicales et infirmières sur ce qu’elles peuvent espérer de leur patient sur le plan fonctionnel et sur la distance qui les sépare de leur base de référence. En tant que membre de l’équipe multidisciplinaire, nous aidons à déterminer les plans appropriés pour nos patients une fois qu’ils ont surmonté leur condition.

Quels sont les signes qui vous indiquent que votre travail a un impact positif sur le patient ?

Nous pouvons constater l’impact positif que nous avons sur les patients lorsque nous constatons une progression quotidienne de leur niveau de fonctionnement, une amélioration physique à l’évaluation et surtout, lorsque nous les voyons sourire chaque fois qu’ils travaillent avec nous. Nous sommes toujours très heureux de les ramener chez eux en toute sécurité auprès de leurs proches, et de voir les patients partir en rééducation, qui est la prochaine étape de leur processus de guérison.

La réalité est que beaucoup de patients hospitalisés sont très affectés par la COVID. Malheureusement, certains de nos patients ne peuvent pas communiquer, que ce soit en raison d’un état préhospitalier (c’est-à-dire la démence, des comorbidités préexistantes nécessitant des soins de longue durée) ou des séquelles d’une infection (altération de l’état mental, faiblesse, confusion). Toutefois, dans certains cas, la famille a exprimé combien il lui importe de traiter et de soigner son proche.

De nombreux patients ont encore un long chemin à parcourir en termes de parcours médical et de réhabilitation. Cependant, beaucoup d’entre eux travaillent avec persévérance (et parfois à contrecœur) pendant la séance de physiothérapie. Si certains restent silencieux relativement à notre aide, ils espèrent cependant des résultats, et d’autres ne sont heureux que lorsqu’ils atteignent leurs objectifs ! Si les patients sont capables de communiquer, ils sont reconnaissants et heureux de nos soins et de notre expertise. Ils parlent souvent de notre patience et sont heureux que nous fassions partie de leur équipe. 

Comment vous êtes-vous adapté à cette nouvelle façon de travailler ?

La crise COVID a fait subir à la plupart d’entre nous des changements considérables. En tant que physiothérapeutes, nous avons dû changer de service et travailler avec des équipes auxquelles nous n’étions pas forcément habitués. En outre, l’anxiété quotidienne et le temps qu’il faut pour enfiler et enlever correctement l’EPI, s’assurer que l’hygiène des mains est conforme aux règles - et espérer ne pas ramener le virus à la maison.

Nous devons nous tenir au courant à la minute près de la façon dont la COVID affecte physiquement une personne, et nous assurer que nous savons comment traiter nos patients de façon appropriée pour ce nouveau problème dont l’évolution est inconnue.

Le plus difficile est de se faire demander plusieurs fois par jour, par plusieurs professionnels dans plusieurs équipes, si nous pensons que notre patient a le potentiel pour s’améliorer et, bien souvent, de ne pas le savoir en raison de la nature inconnue de ce virus.

Nous ne sommes pas autorisés à apporter beaucoup d’équipement dans les salles et il est difficile de trouver une deuxième personne pour aider les personnes à mobilité réduite. Nous ne pouvons pas non plus utiliser la salle de gym des patients, ce qui nuit à notre population plus fonctionnelle.

En outre, il n’est plus facile de vérifier l’état général d’un patient. Il est très difficile de bavarder pour voir comment il va derrière la vitre ou si le patient ne veut pas ou ne peut pas répondre au téléphone.

Nous avons changé la méthode d’évaluation et de traitement de nos patients. Nous sommes confinés dans leur chambre et ne pouvons pas vraiment pousser leur capacité d’activité. Cela rend les progrès plus difficiles et moins stimulants pour nos patients.

De plus, la planification des affectations est devenue un cauchemar. Des changements quotidiens affectent les centres qui acceptent nos patients COVID positifs. Même les patients qui retournent à leur domicile ont vu des obstacles, car les critères changent chaque jour, qu’ils soient positifs ou négatifs. Les CLSC ont de la difficulté à répondre aux besoins accrus de certains de nos patients. De plus, les patients qui retournent chez eux ont beaucoup à faire pour voir qui peut s’occuper d’eux, et s’ils sont à risque de propager le virus.

Une préoccupation majeure a été le statut des patients tout au long de la progression de la maladie. D’après notre expérience, le virus a souvent une évolution imprévisible qui peut conduire à une détérioration soudaine, ce qui nous amène à nous demander si ce déclin soudain de l’état est irréversible. C’est une situation démotivante et inquiétante. L’incapacité à prédire le potentiel de certains de nos patients complexes a été assez difficile pour nous tous, quelle que soit notre expérience, car nous considérons que cela fait partie des compétences des physiothérapeutes.

Une journée dans la vie du physiothérapeute : à quoi ça ressemble-t-il ?

Nous commençons par changer de vêtements : nous revêtons les « scrubs », l’uniforme des unités COVID, pour nous assurer que nous minimisons la contamination à l’extérieur de l’hôpital. Nous amenons des chariots dans l’un des services pour nous assurer que nous disposons de postes de désinfection des écrans faciaux appropriés. Nous faisons le tour de chaque unité COVID pour vérifier les nouveaux formulaires de consultation, c’est-à-dire les nouveaux patients que l’équipe de physio du COVID devrait voir.

Nous avons une discussion de groupe où nous nous tenons tous les six au courant, et nous essayons de nous assurer que le travail est réparti équitablement et que l’un des autres membres de l’équipe n’est pas seul - afin que nous puissions vérifier l’hygiène des mains et le port de l’EPI. Nous participons à des rondes multidisciplinaires quotidiennes où nous prenons part au plan de soins du patient. Nous discutons avec les infirmières et les PAB de la capacité de chaque patient à participer à l’activité ou de tout changement que nous constatons au jour le jour. Chaque patient que nous voyons prend beaucoup plus de temps, non seulement en raison de la partie hygiène, mais aussi en raison du travail qui doit être effectué en dehors de la chambre pour connaître l’histoire de ce patient.

Nous essayons de nous assurer que tout le monde reçoit les mêmes soins que s’il n’était pas COVID positif. Nous nous réunissons une ou deux fois par jour pour nous assurer que nous restons au courant des politiques, pour nous aider mutuellement à résoudre les problèmes qui se posent et souvent simplement pour nous soutenir mutuellement. Nous partons souvent plus tard pour nous assurer que nous sommes correctement décontaminés avant de quitter l’hôpital.

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