Guéri après avoir été malade pendant des décennies
Lorsqu’il était enfant, Gérard Genest passait plus de temps à l’Hôpital de Montréal pour enfants qu’à l’école, souffrant d’afibrinogénémie congénitale. Cette maladie rare empêche le sang de coaguler adéquatement et se traduit par des saignements spontanés ou provoqués, entraînant un traumatisme mineur.
« Une simple piqûre d’aiguille provoquait des saignements qui ne s’arrêtaient pas, se rappelle l’homme aujourd’hui âgé de 62 ans. Je devais tenir mon bras en l’air pendant une trentaine de minutes et je pouvais m’attendre à ce que le saignement dure jusqu’à deux jours. »
Depuis sa naissance, Gérard devait recevoir des transfusions de sang en raison de l’afibrinogénémie. Toutefois, pendant sa croissance, les experts n’avaient pas encore découvert comment les transfusions de sang pouvaient transmettre le virus de l’hépatite C (VHC), maladie qui attaque le foie. À l’âge de 32 ans, Gérard a appris la nouvelle dévastatrice selon laquelle il avait contracté le VHC.
« En 1989, les médecins ne savaient pas grand-chose du VHC, souligne Gérard. Ils m’ont conseillé de faire attention à ma consommation d’alcool. »
Les années ont passé, et Gérard a tenté de reprendre une vie normale, malgré ses saignements et le VHC. À 41 ans, on l’a envoyé consulter le Dr Marc Deschênes, spécialiste en hépatologie et en transplantation du foie, et directeur du Département d'hépatologie du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Le Dr Deschênes a commencé à traiter Gérard pour le VHC – au moyen d’une série d’injections douloureuses administrées tous les deux ou trois jours. Gérard a reçu ces injections pendant cinq mois, avant qu’elles provoquent une éruption cutanée terrible, couvrant l’ensemble de son corps.
« Je me suis rendu au cabinet du Dr Deschênes, j’ai enlevé mes vêtements et lui ai dit : "Regardez-moi!" Il a tout de suite compris et fait cesser les injections. »
Plus la période pendant laquelle le VHC n’est pas traité est longue, plus ce virus risque de causer d’autres maux. Gérard a donc dû essayer différents cocktails médicamenteux; mais rien ne semblait fonctionner. Lorsque Gérard a eu 51 ans, le VHC avait malheureusement progressé et avait provoqué un cancer du foie. C’est alors qu’on lui dit qu’il aurait besoin d’une greffe du foie pour survivre.
« Je pleurais comme un veau lorsque j’ai téléphoné à ma femme, Johanne », poursuit Gérard.
Moins d’une heure après avoir reçu le diagnostic, Gérard était chez lui, avec Johanne. En présence de sa conjointe, il éprouva un vif changement d’avis quant à sa situation. « J’ai regardé Johanne dans les yeux, j’ai cessé de pleurer, et je lui ai dit : "On a un travail à faire. Et on va y arriver. " ».
Un combat difficile
Six mois se sont écoulés avant que l’on informe Gérard d’une possible compatibilité avec un donneur. Poussé par l’adrénaline, il s’est alors précipité à l’hôpital et a commencé à se préparer en vue d’une chirurgie susceptible de lui sauver la vie. Toutefois, une demi-heure avant l’opération, il apprend la nouvelle dévastatrice selon laquelle le foie du donneur n’était pas en bon état.
« Le médecin m’a expliqué que j’aurais plus de problèmes avec le foie de ce donneur qu’avec le mien, se rappelle Gérard. J’étais déçu, mais étrangement, j’étais soulagé également. En fait, j’ai remercié le médecin – il m’a fait réaliser que son équipe et lui ne se contenteraient pas d’une solution rapide. Ils avaient réellement mon intérêt supérieur à cœur. »
Il y a malheureusement eu une autre fausse alarme avant qu’on donne enfin le feu vert pour la greffe. En janvier 2009, alors qu’ils nettoyaient la cuisine, Gérard et sa femme ont reçu le coup de fil tant attendu.
« Nous avons laissé la vaisselle en plan et avons accouru jusqu’à l’hôpital », raconte Gérard, en riant.
Le couple a passé la nuit à l’Hôpital Royal Victoria. Pendant ce temps, la Dre Molly Warner – directrice du Centre de traitement de l’hémophilie du CUSM, qui suivait déjà Gérard – a déployé beaucoup d’efforts pour qu’il ait une perfusion avant la chirurgie, destinée à corriger le déficit en fibrinogène, réduisant ainsi le risque élevé de saignements. Le lendemain, Gérard a été opéré avec succès par le Dr Prosanto Chaudhury, chirurgien spécialisé en transplantation d’organes et membre du programme de greffes multi-organes du CUSM. Les médecins ont dû attendre trois jours avant de suturer complètement la plaie, à cause de l’intensité de l’œdème. Gérard a finalement guéri; il s’est non seulement parfaitement remis de son cancer, mais aussi de l’afibrinogénémie.
« En procédant à l’ablation du foie, on a aussi guéri mon afibrinogénémie, car mon nouveau foie fabriquait normalement du fibrinogène. La greffe a corrigé le problème de saignements que j’avais depuis ma naissance! »
Le couple Genest avait l’âme en fête.
Cet état d’euphorie n’a hélas pas duré longtemps. Gérard a rejeté son foie une semaine plus tard, et on a dû augmenter la dose des médicaments antirejet.
Parallèlement, le VHC est devenu agressif, et Gérard a reçu un diagnostic de diabète de type 2.
« Je devais m’injecter de l’insuline quatre fois par jour et limiter ma consommation d’aliments que j’aimais beaucoup », ajoute-t-il.
Quelques années plus tard, Gérard a subi un autre choc lorsqu’il a été contraint de quitter un emploi qu’il adorait, dans le domaine de l’informatique.
« Perdre mon emploi a été dévastateur pour moi, mais je devenais trop faible. Je devais rester en vie pour être là le jour où l’on pourrait enfin guérir le VHC. »
Gérard a continué de lutter – en 2013, il avait 56 ans, et une possibilité intéressante s’est offerte à lui.
« Lors d’un congrès à Boston, le Dr Deschênes avait entendu parler d’un médicament expérimental, qui en était au dernier stade des essais cliniques, poursuit Gérard. L’entreprise proposait d’offrir ce traitement à deux patients du CUSM. J’ai sans hésiter accepté de participer à cette étude. »
Gérard devait prendre un comprimé par jour, pendant 24 semaines. Après deux semaines de traitement, il n’y avait plus de trace du VHC dans son sang. Après 24 semaines, il était totalement guéri.
« Je me sentais super bien! s’exclame Gérard en riant. Une maladie que j’avais depuis des décennies a été guérie en quelques semaines! La situation était aussi nettement meilleure du côté du diabète! J’ai pu remplacer les injections d’insuline par la prise d’une pilule par jour. »
La santé est devenue le nouvel état normal de Gérard. Il avait plus d’énergie, et sa capacité de concentration avait augmenté, mais il éprouvait encore de la douleur. On lui redonnait sa vie, et il pouvait maintenant décider lui-même de ce qu’il voulait en faire.
« J’ai demandé au Dr Deschênes si je pouvais voyager. Il a répondu : "Oui!" Le jour même, Johanne et moi faisions des réservations pour notre voyage de rêve en Italie. »
Une seconde chance
Quelques mois plus tard, Gérard et Johanne étaient sous le soleil de Rome, en Italie, par un magnifique jour de printemps. Ce rêve, qu’ils avaient pendant des années considéré comme impossible, se réalisait enfin! Gérard était guéri et en santé, et il était en voyage avec celle qui l’avait accompagné pendant toutes les étapes de sa maladie.
« Notre rêve d’aller en Italie se réalisait, se souvient Gérard. Nous sommes allés à Rome, à Florence, puis avons terminé notre voyage à Venise, la Sérénissime. Nous avons vu des sites d’une beauté à couper le souffle et avons dégusté des mets exquis. J’ai aussi pu converser en italien avec les gens du pays. »
Animés par une nouvelle joie de vivre, Gérard et Johanne sont retournés en Italie et ont aussi visité la France. Lorsque Gérard n’est pas en train d’explorer la planète, il passe ses journées dans le confort de son foyer à lire sur les merveilleux trésors que notre monde a à offrir.
« Je suis en vie et je vais bien », conclut l’homme de 62 ans.
Gérard est reconnaissant envers les scientifiques qui ont sans relâche cherché un traitement pour le VHC. Il remercie également le personnel du CUSM, qui n’a ménagé aucun effort pour rendre ses séjours à l’hôpital les plus agréables possible. Il tient à remercier tout particulièrement les Drs Deschênes, Chaudhury et Warner, et leurs équipes dévouées.
Grâce au soutien indéfectible de ses médecins, il n’a jamais eu l’impression d’être un cas désespéré, même si la situation pouvait parfois sembler sans issue.
« J’ai confiance en nos médecins et dans les soins qu’ils dispensent, conclut Gérard avec conviction. Malgré les hauts et les bas, ils ont trouvé la solution me permettant de recouvrer la santé, et pour cela, je leur dis : "Grazie mille!” »