Un programme ambitieux, développé au CUSM, fait ses preuves
Tous les jours, les travailleurs de la santé emploient des centaines de différents produits et appareils médicaux, allant de simples gants d'examen, bandages ou seringues aux pompes à perfusion, défibrillateurs et lasers chirurgicaux. Lorsque ces produits sont défectueux ou mal employés, ils peuvent causer des incidents ou des accidents qui s’avèrent dangereux pour les patients. Il importe donc grandement de signaler tout incident.
L'été dernier, le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) a instauré un système normalisé permettant à une équipe de travail d’évaluer rapidement les risques associés aux produits médicaux après un accident ou un incident, puis de procéder ou non à leur retrait volontaire. Depuis sa mise en place, le système de Gestion d’incident ou accident de matériel (MIAM) a réussi à réduire considérablement le délai d’exécution du processus, qui est passé de 181 jours à seulement 7 jours.
« Dès que le programme a été instauré, nous sommes tombés à 38 jours, et ça continuait à diminuer. Nous visons un délai de 48 heures, et on va y arriver », explique Philippe Bexton, coordonnateur, Sécurité des patients et projet MIAM. Dès octobre 2014, le projet réunissait des participants des départements de la Gestion du matériel, de l'Approvisionnement, de la Gestion de la qualité, des Soins infirmiers et de la Planification de la transition, alors que le CUSM faisait l'achat de nouveaux équipements et de matériel en vue du déménagement au site Glen. À l’époque, un événement grave ainsi que plusieurs cas moindres liés au matériel avaient révélé la déficience du système de gestion en place.
« Nous avons constaté que la procédure n'était pas normalisée », dit Philippe. « Dans certains cas, les cliniciens contactaient le fabricant directement, alors que dans d'autres cas ils s’adressaient à différents services du CUSM : l'Approvisionnement, la Gestion de la qualité, la Sécurité des patients, etc. Il nous fallait attendre en moyenne trois mois après un événement pour recevoir l’évaluation du fabricant. Maintenant, nous n’attendons plus. Nous évaluons rapidement le risque à l’interne à l’aide d’un algorithme développé lors d'un événement Kaizen Lean Six Sigma, et nous procédons d’après le résultat afin de minimiser le risque pour nos patients ».
47777, le numéro à composer
Afin d'accélérer le processus, un nouveau numéro de service à la clientèle a été créé pour permettre au personnel médical de signaler facilement un problème: le 47777.
« Par exemple, si un tube est perforé ou qu’un cathéter est défectueux, ils n’ont qu’à composer le 47777. Un représentant du service à la clientèle les aidera à remplir le rapport d'incident et leur rappellera de garder le produit pour ramassage », affirme Angie Presta, chef, Services des achats, et chargée de présenter le programme MIAM aux différentes équipes du CUSM. « Il est important de signaler un évènement rapidement pour évaluer les risques et prévenir d'autres incidents ailleurs ».
L’infirmier-chef Siva Moonsami a contacté le MIAM quelques fois et est satisfait des résultats.
« Nous avions un problème avec une pièce d'équipement coûteuse qui coulait continuellement », explique Siva, qui supervise 50 infirmiers et infirmières à l'Unité des soins intensifs de l'Hôpital neurologique de Montréal (HNM - CUSM). « J'ai appelé le 47777, suivi les étapes, et en moins de 24 heures un préposé est venu le ramasser. Le lendemain, j’ai reçu un appel avec les informations du fabricant. Le système fonctionne. »
Toute l’information recueillie lors du premier appel est entrée dans une base de données nouvellement développée pour le MIAM. Un partenariat avec Santé Canada permet d'y ajouter au dossier des indicateurs externes au CUSM.
« Nous sommes l'un des 14 établissements participant au Réseau sentinelle canadien pour les matériels médicaux (ResSCMM), un programme de Santé Canada créé pour accroître l'utilisation sécuritaire des appareils médicaux, explique Philippe. Lorsque nous entrons un signalement, un courriel automatisé est envoyé à ResSCMM, qui effectue une analyse environnementale des événements similaires s’étant produits au Canada, aux États-Unis, en Angleterre, en Suisse et en Australie. »
Une fois que les résultats de l’analyse ont été entrés dans la base de données du CUSM, le système rend l’une de deux décisions possibles : soit aucune action n’est nécessaire, soit une équipe de travail est appelée à déterminer si le produit devrait être retiré. Les gestionnaires de l'unité où l'événement s’est produit recevront un courriel automatisé les informant de l’aboutissement du processus.
« Le suivi est très important. Nous voulons sensibiliser les gestionnaires afin qu'ils adoptent cette procédure et qu’ils la communiquent à leur équipe », dit Angie.
La stratégie semble fonctionner. Siva, qui a déjà encouragé des infirmières à déposer des rapports d'incidents, s’est assuré d'expliquer la nouvelle procédure à son équipe.
« Si quelque chose arrive durant la fin de semaine ou la nuit, le personnel sait quoi faire, dit-il. Ça demande de la discipline, mais en fin de compte c’est la sécurité des patients et des employés qui est en jeu ».
Reconnaissance de Santé Canada
En 2015, le CUSM a reçu de Santé Canada un Certificat d'appréciation pour son dévouement à la sécurité des patients pour son système MIAM.
Paul Harmat, promoteur du projet et directeur associé de l'Approvisionnement et de la gestion du matériel, attribue le succès du projet au dévouement de l'équipe.
« En s’inspirant de principes d’optimisation de base, les différents départements ont jugé que la sécurité des patients et la qualité du matériel étaient une priorité, et ils ont investi leur énergie en conséquence, dit-il. Non seulement ont-ils reconnu une occasion d’améliorer la situation, ils ont agi pour ce faire. Je suis très fier de ce que l’équipe a accompli ».
Malgré son succès, l'équipe du MIAM ne se reposera pas sur ses lauriers.
« Le MIAM s’inscrit dans un processus d'amélioration continue, dit Philippe. Nous allons continuer à chercher à offrir un meilleur service aux utilisateurs de première ligne et à minimiser les risques pour les patients ».
Le saviez-vous?
Une enquête menée auprès de 2.341 employés durant les séances d’orientation au Glen a démontré que 55% des répondants ignoraient qu’ils devraient signaler un incident ou un accident lié au matériel.