Une découverte majeure sur la résistance aux médicaments nommée au palmarès des Découvertes de l’année de Québec Science
Une équipe de chercheurs montréalais découvre un nouveau mécanisme de transmission de la résistance aux médicaments
Des chercheurs de l’Université de Montréal, de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) et de l’Université McGill ont mis au jour un mécanisme de transmission de la résistance aux médicaments entre les parasites Leishmania, qui causent l’infection dévastatrice appelée leishmaniose. La découverte de ce mécanisme utilisé dans la communication intercellulaire (de cellule à cellule), qui figure au Palmarès des dix découvertes de l’année 2022 de Québec Science, pourrait mener à d’importants progrès dans la lutte à la résistance aux médicaments utilisés pour traiter non seulement cette infection tropicale, mais aussi le cancer et d’autres maladies infectieuses.
« On sait depuis longtemps que la résistance à un médicament peut se développer lorsqu‘un pathogène [ce qui cause une maladie] est en contact avec ce médicament. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on doit encadrer et limiter l’utilisation des antibiotiques », explique Martin Olivier, Ph. D., co-principal investigateur de l’étude et scientifique au sein du Programme en maladies infectieuses et immunité en santé mondiale à l’IR-CUSM. « Ce que nous avons découvert de nouveau, c’est que la résistance aux médicaments peut aussi être transmise d’une cellule à une autre sans la présence du médicament. »
Le parasite Leishmania est transmis par la piqûre d’une mouche des sables infectée (phlébotome femelle) et provoque des symptômes importants, comme des lésions cutanées causant de graves cicatrices et handicaps, chez plus de 1,5 million de personnes chaque année. Présente dans les régions tropicales et subtropicales, l’infection a commencé à s’étendre vers le nord. Cette expansion pourrait être facilitée par les changements climatiques, à mesure que de nouveaux habitats deviennent propices aux insectes vecteurs et aux espèces réservoirs de la maladie.
Dans leur étude publiée en juillet 2022 dans le journal Cell Reports, les chercheurs ont montré que les Leishmania résistants aux médicaments libèrent des vésicules extracellulaires (des nanoparticules sécrétées par les cellules) qui contiennent des gènes de résistance aux médicaments. Ces gènes sont transmis aux parasites non-résistants par l’intermédiaire des vésicules. Les parasites recevant ces vésicules deviennent résistants à leur tour et plus vigoureux, ce qui contribue à la prolifération de l’infection.
« La lutte contre les parasites causant la leishmaniose a été négligée, et ceux-ci sont devenus résistants aux quelques traitements existants, entraînant de lourdes conséquences pour les patients humains et canins, explique Christopher Fernandez Prada, co-principal investigateur de l’étude et professeur agrégé à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal. À cause de cette situation critique, plusieurs pays ont cessé l’utilisation des médicaments en cause. Mais la résistance a continué à se propager de façon inexpliquée. Grâce à nos travaux mettant en valeur le rôle des vésicules extracellulaires dans la transmission de la résistance, ce mystère est maintenant élucidé et la recherche de médicaments destinés à contrer la propagation de la résistance peut commencer ».
Cette découverte ouvre la voie au développement de médicaments inhibant la formation de vésicules non seulement chez les parasites Leishmania, mais chez les cellules eucaryotes en général, c’est-à-dire les cellules qui forment le monde vivant. De tels médicaments pourraient potentiellement être développés pour contrer la résistance aux médicaments utilisés pour traiter de nombreuses maladies.
« Nous avons fait la première démonstration de transfert d’ADN par l’entremise de vésicules extracellulaires chez les cellules eucaryotes, qui composent le monde animal et végétal, ajoute Martin Oliver. C’est une découverte majeure, car elle offre de nouvelles façons de lutter contre la résistance aux traitements. »
Pour en savoir plus, lisez l’article du magazine Québec Science
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À propos de l’étude
L’étude Leishmania parasites exchange drug-resistance genes through extracellular vesicles a été conduit par Noélie Douanne, George Dong, Atia Amin, Lorena Bernardo, Mathieu Blanchette, David Langlais, Martin Olivier et Christopher Fernandez-Prada.