Des « détectives » au CUSM : le rôle essentiel des services de Prévention et contrôle des infections
Aux yeux de certains employés du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), les services de Prévention et contrôle des infections (PCI) ont la responsabilité de s’assurer que tout le monde s’est lavé les mains et que l’on a désinfecté l’ensemble des surfaces. Toutefois, l’équipe dévouée de douze spécialistes et quatre membres du personnel de soutien travaillant dans les sites pour adultes et dans l’hôpital pédiatrique font beaucoup plus que cela.
« Le rôle des services de Prévention et contrôle des infections est de colliger de l’information, de cerner des enjeux et de collaborer avec les équipes des services cliniques et des services administratifs afin de trouver des solutions à ces problèmes. Nous faisons également la promotion des pratiques exemplaires, en suggérant des changements de processus et de comportements », explique Ramona Rodrigues, gestionnaire, Prévention et contrôle des infections, hôpitaux pour adultes du CUSM.
Les approches multidisciplinaires se sont avérées très prometteuses; en effet, on a constaté des améliorations à divers égards : hygiène des mains et nettoyage des surfaces, diminution des risques pour les chirurgies cardiaques, identification de la surutilisation d’antibiotiques pour traiter des infections urinaires et amélioration des communications liées aux marqueurs de maladies infectieuses à l’Urgence, toujours en visant l’objectif ultime d’assurer la sécurité des patients.
Une série de succès misant sur une approche multidisciplinaire
Les services de PCI ont à leur actif plusieurs projets réussis. Ils ont non seulement contribué à réduire les taux d’infection et à garder les patients en meilleure santé, mais ont aussi prévenu des éclosions (voir la barre latérale); ils ont également permis de réduire les coûts d’hospitalisation et ont mérité des prix (voir l’article intitulé Le MSSS rend hommage à l’équipe d’une initiative interdisciplinaire pour avoir réduit le nombre d’infections nosocomiales). Le succès de cette équipe repose sur une approche multidisciplinaire fondée sur la collaboration entre les médecins et le personnel des Soins infirmiers et de divers services cliniques. En voici quelques exemples :
- Après le déménagement sur le site Glen en 2015, l’unité de transplantation de l’Hôpital Royal Victoria a déclaré des éclosions d’entérocoques résistant à la vancomycine (ERV) et de C. difficile. En un an seulement, le plan d’action, qui comprenait des audits, afin de s’assurer du respect des consignes en matière d’hygiène des mains et de nettoyage adéquat et d’aseptisation appropriée de l’environnement, a obtenu des résultats très positifs. En effet, il a fait baisser le taux d’ERV de 92 pour cent et celui d’infection au C. difficile de 48 pour cent.
- L’équipe des services de Prévention et contrôle des infections des hôpitaux pour adultes a constaté que les taux d’infection étaient élevés dans certaines chirurgies cardiaques, comme des remplacements valvulaires et des transplantations. Analysant les dossiers plus en profondeur, elle a réduit l’ampleur du problème grâce à l’identification des patients ayant contracté des infections chez qui le taux de glycémie était élevé. On a mis au point une approche multidisciplinaire et émis des directives pour contrôler les niveaux de glucose avant, pendant et après les chirurgies.
- Au pavillon Camille-Lefebvre, à l’Hôpital de Lachine, on a observé un nombre d’infections urinaires élevé chez les patients gériatriques. Un examen a permis de conclure que l’on surutilisait les antibiotiques et les cathéters urinaires. Une approche multidisciplinaire, comprenant des directives qui prévoyaient l’utilisation de cathéters uniquement lorsque c’était nécessaire du point de vue médical et l’administration d’antibiotiques seulement lorsque des infections avaient été diagnostiquées, a permis de réduire de 11 pour cent les infections liées à l’utilisation de cathéters au cours de la première année et de 48 pour cent l’année suivante.
- Les infirmières responsables du triage à l’Urgence utilisent un logiciel qui leur permet de diffuser rapidement les renseignements importants relatifs aux patients – comme une fièvre supérieure à 40°C et un séjour dans un pays touché par une éclosion. Ces renseignements portent un code de couleur dans le dossier du patient, de manière à ce que tous les autres intervenants prennent les précautions nécessaires.
- L’équipe responsable de la prévention et du contrôle des infections dans les hôpitaux pour adultes met en œuvre une gestion plus cohérente des antibiotiques administrés à titre prophylactique aux patients subissant une cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (procédure endoscopique pour les conduits pancréatiques et biliaires), avec l’objectif de réduire les taux d’infection.
- Les taux d’infection ont été réduits chez les patients ayant subi une opération au cerveau ou chez qui on avait pratiqué une dérivation, et ce, grâce à des discussions approfondies avec les équipes médicales de neurochirurgie et de soins infirmiers.
- Une collaboration multidisciplinaire a joué un rôle déterminant quant à la diminution du nombre d’infections liées à un cathéter intraveineux.
- Les services de Prévention et contrôle des infections dans les hôpitaux pour adultes ont préparé des trousses de renseignements consacrées à la prévention, et ce, pour chacun des types de chirurgies, afin de réduire le nombre d’infections sur les sites chirurgicaux. Ces trousses comprennent des marches à suivre pour l’évaluation et pour l’examen de la prophylaxie chirurgicale faite en collaboration avec des pharmaciens, de même pour le recours systématique aux ordonnances des médecins pré-imprimées, en collaboration avec le personnel des soins infirmiers et les médecins.
- Après le déménagement sur le site Glen, on a observé une augmentation du nombre d’infections liées aux voies veineuses centrales à l’unité des Soins intensifs. On a constitué une équipe multidisciplinaire à l’Hôpital de Montréal pour enfants – comprenant des membres des services de Prévention et contrôle des infections, des spécialistes de l’accès vasculaire et des membres de la direction des Soins infirmiers à l’unité des soins intensifs – on a également formé 85 pour cent des infirmières de l’unité des Soins intensifs sur l’utilisation adéquate des lignes veineuses centrales. Cette initiative s’est traduite par une réduction de presque 50 pour cent du taux de ce type d’infections.
- En 2016-2017, il y a eu plusieurs cas d’exposition à la varicelle dans les cliniques externes de l’Hôpital de Montréal pour enfants, car les patients ayant la varicelle n’avaient pas été évalués ni isolés assez rapidement. En réaction à cette situation, une équipe formée d’infirmières, de commis, de médecins et de membres des services de Prévention et contrôle des infections ont mis au point un questionnaire à l’intention des patients et des familles; ce questionnaire portait sur les symptômes de la varicelle lors de l’enregistrement des patients qui se présentaient pour un rendez-vous. Les cas d’exposition à la varicelle ont depuis grandement diminué.
Mobilisation rapide pour contenir la propagation de la rougeole
En mars dernier, les services de Prévention et contrôle des infections du CUSM ainsi que d’autres secteurs de l’institution se sont mobilisés rapidement et ont vite contenu une exposition à la rougeole dans les hôpitaux pour adultes sur le site Glen.
Un employé du CUSM présentant de vagues symptômes a développé l’éruption caractéristique de la rougeole et a subi un test de dépistage de la maladie. Neuf jours plus tard, le laboratoire provincial faisait parvenir un résultat positif quant à la présence du virus très contagieux.
Une équipe multidisciplinaire, dirigée par la Dre Marie‑Astrid Lefebvre, spécialiste des maladies infectieuses, s’est activée. Ces professionnels ont identifié une période de cinq jours et trois emplacements dans l’hôpital où les patients et les membres du personnel auraient pu être exposés à la rougeole. Ils ont par la suite dressé une liste d’employés et de patients qui avaient travaillé à ces emplacements ou qui s’y s’étaient présentés au cours de périodes précises. Ils ont fait parvenir 271 lettres recommandées aux patients qui avaient été exposés et ont publié un communiqué informant les visiteurs du CUSM de l’exposition à la rougeole.
La Dre Lefebvre s’inquiétait de la nature très contagieuse du virus qui circule dans l’air et de la vulnérabilité des patients qui y sont exposés, plus particulièrement les personnes âgées et les patients immunodéprimés.
Elle s’en est toutefois tenue à certains principes de base : « Ne pas céder à la panique et agir de manière très méthodique. » Elle affirme être reconnaissante envers son équipe et envers plusieurs autres secteurs (comme le service de Santé au travail), qui ont contribué à identifier les personnes à vacciner et qui ont aidé à colliger d’autres renseignements, qui ont fait passer des tests aux employés n’ayant aucune preuve de vaccination contre la rougeole et qui ont gardé la communauté du CUSM et le grand public informés.
Au bout du compte, il n’y a eu aucune transmission de la rougeole attribuable à cette exposition.
La Dre Lefebvre considère la vaccination essentielle pour contenir la propagation de la maladie.
Bon nombre des personnes potentiellement exposées au virus ont été immunisées, créant ainsi l’immunité de groupe, ce qui constitue une bonne mesure de protection chez un grand nombre de personnes. Toutefois, la Dre Lefebvre réserve ses sincères félicitations pour les membres de la haute direction, l’équipe de Santé au travail et la Santé publique, ainsi que pour les infirmières et les médecins gestionnaires, de même que pour le service des Ressources humaines, qui ont tous fait des heures supplémentaires pour aider à éviter le scénario du pire. « Une approche fondée sur l’intervention d’une équipe multidisciplinaire s’avère réellement importante, dit-elle. Nous nous réjouissons de pouvoir compter sur une telle équipe au CUSM. »