Les équipes de génétique et d'oncologie unissent leurs forces pour offrir plus rapidement des tests génétiques aux patientes atteintes d'un cancer de l'ovaire

En 2017, la Society of Gynecologic Oncology of Canada (Société de gynécologie-oncologie du Canada) a publié de nouvelles recommandations relativement à l’administration de tests génétiques aux femmes ayant reçu un diagnostic de cancer de l’ovaire séreux de haut grade – il s’agit du type de cancer de l’ovaire le plus répandu, pour lequel le taux de survie est le plus faible. Le slogan No woman left behind (aucune femme ne doit être laissée-pour-compte) était son appel à l’action.

De gauche à droite : Clinique de gynécologie-oncologie : Joanne Power, infirmière clinicienne spécialiste, et la Dre Ziggy Zeng, gynécologue oncologue; Génétique médicale : Lola Cartier, chef du service, Laurence Baret et Evan Weber, conseillers en génétique. N’apparaissent pas sur la photo : le Dr William Foulkes, généticien et directeur du programme en génétique du cancer à l’HGM-CUSM, Dre Lucy Gilbert et Dr Kris Jardon, gynécologues oncologues, Laura Palma, conseillère en génétique et Enza Ambrosio, infirmière-pivot.
De gauche à droite : Clinique de gynécologie-oncologie : Joanne Power, infirmière clinicienne spécialiste, et la Dre Ziggy Zeng, gynécologue oncologue; Génétique médicale : Lola Cartier, chef du service, Laurence Baret et Evan Weber, conseillers en génétique. N’apparaissent pas sur la photo : le Dr William Foulkes, généticien et directeur du programme en génétique du cancer à l’HGM-CUSM, Dre Lucy Gilbert et Dr Kris Jardon, gynécologues oncologues, Laura Palma, conseillère en génétique et Enza Ambrosio, infirmière-pivot./figcaption>

Cela signifiait que toutes les femmes atteintes d’un cancer de l’ovaire de haut grade devaient se voir offrir des tests de dépistage génétique dans les plus brefs délais. À l’époque, le personnel du service de Génétique médicale du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) se creusait déjà les méninges pour trouver des moyens de permettre à ces patientes d’avoir accès plus rapidement à des tests génétiques ainsi qu’à du conseil génétique complet, offert en temps opportun, si les résultats des tests s’avéraient positifs.

« Les délais d’attente constituaient un problème, explique Laurence Baret, conseillère en génétique. Les médecins recevaient des patientes et discutaient de traitements avec elles; ce n’est qu’à ce moment qu’ils les recommandaient pour une consultation au service de génétique en oncologie. Les cas urgents pouvaient obtenir un rendez-vous au cours des semaines suivantes, mais les autres patientes pouvaient attendre une année ou plus. Cette situation ne répondait pas aux attentes. »

Le caractère urgent de la situation est fondé. Un résultat positif signifie que la femme est porteuse d’une mutation du gène BRCA1 ou BRCA2. Les gènes BRCA régissent la croissance des cellules dans certains tissus de l’organisme. La mutation entraîne une augmentation du risque de développer un cancer de l’ovaire et un cancer du sein et n’est pas sans conséquences, tant pour la patiente – puisque certains traitements seraient plus efficaces pour ce type de cancer héréditaire – que pour les membres de sa famille, indépendamment de leur sexe.

« Les filles, les sœurs ainsi que d’autres membres de la famille de sexe féminin qui reçoivent des résultats positifs peuvent prendre des mesures pour réduire leur propre risque de développer un cancer de l’ovaire ou un cancer du sein, poursuit Evan Weber, conseiller en génétique. Toutefois, même des hommes peuvent être porteurs de ces mutations génétiques et les transmettre à leurs filles. Par ailleurs, certaines mutations sont associées à des cancers qui peuvent affecter les hommes, comme le cancer de la prostate ou le cancer du pancréas. »

Esprit d’initiative et collaboration

S’inspirant des programmes existant dans d’autres régions du Canada et faisant eux-mêmes preuve de créativité, Laurence Baret et Evan Weber ont mis au point un nouveau système, destiné à accélérer l’accès aux tests génétiques pour les patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire. Ils ont fait équipe avec Joanne Power, infirmière clinicienne spécialiste à la Clinique de gynécologie oncologique; cette collègue a facilité la collaboration entre les deux services (voir la section intitulée Trucs de Laurence, d’Evan et de Joanne pour assurer le succès d’un projet multidisciplinaire). Auparavant, toutes les patientes avec un cancer de l’ovaire séreux de haut grade étaient vues en génétique médicale pour une consultation pré-test qui pouvait prendre jusqu'à une heure. Sous le nouveau modèle :

  • L'oncologie gynécologique prend en charge cette consultation, ce qui accélère l’accès au test génétique pour la patiente et donne aux conseillers plus de temps pour voir les personnes qui pourraient nécessiter une plus grande expertise génétique; 
  • L’oncologue discute des avantages du test avec la patiente et lui remet un document d’information; 
  • Une fois qu’elle confirme son désir de passer le test, la patiente subit des analyses de sang visant le dépistage de la présence des gènes BRCA1 et BRCA2 ainsi que d’autres gènes connus comme étant associés à une prédisposition au cancer de l’ovaire ; 
  • Le service de génétique médicale a la responsabilité de dévoiler l’ensemble des résultats des tests génétiques à la patiente et, si les résultats sont positifs, cette dernière reçoit le conseil génétique adéquat.
Johanna Echlin

Johanna Echlin, actuellement traitée pour un cancer de l’ovaire au CUSM, a participé au processus décrit ci-dessus.

« Peu de temps après mon diagnostic, mon oncologue m’a parlé du test; j’ai constaté avec plaisir que c’était simple et pratique, puisque cela pouvait se faire au CUSM, ajoute Johanna. Par contre, mes sœurs, mes nièces et mes petitesnièces attendaient avec impatience de connaître les résultats.

Heureusement, je ne suis pas porteuse de la mutation. Tous les membres de la famille ont accueilli cette nouvelle avec soulagement. »

Un test qui peut sauver des vies

« Nous expliquons aux patientes quelles conséquences les résultats peuvent avoir pour elles et pour les membres de leur famille, qui deviennent admissibles aux tests génétiques et au conseil génétique offert au CUSM, explique Laurence Baret. Nous ne pouvons rien changer au fait que nos patientes ont un cancer de l’ovaire, mais grâce aux tests génétiques, nous pouvons aider les membres de la famille à procéder au dépistage précoce de cancers ou à les éviter, et cela est très important pour eux. »

Cette situation a fait en sorte que les conseillers en génétique ont eu davantage de temps pour rencontrer les patientes dont les résultats étaient positifs.

Pour la Dre Ziggy Zeng, gynécologue oncologue et l’une des trois médecins responsables des tests administrés aux patients à la Clinique d’oncologie du CUSM, le fait de donner rapidement un diagnostic a une incidence importante sur les traitements.

Trucs de Laurence, d’Evan et de Joanne pour assurer le succès d’un projet multidisciplinaire

Avoir une bonne communication!

À ce jour, quelque 40 patientes ont bénéficié du nouveau système, et 30 d’entre elles ont reçu des résultats négatifs.

Il est possible d’atteindre cet objectif en affectant au projet une personne-ressource qui sert de pont entre les deux équipes. Au lieu d’organiser des réunions, Joanne Power a écrit de nombreux courriels et a fait beaucoup d’appels téléphoniques, afin que toutes les personnes concernées soient sur la même longueur d’onde. « Il est plus facile d’agir ainsi que d’organiser des rencontres visant à réunir tout le monde », ajoute cette dernière.

« Les patientes porteuses de mutations du gène BRCA ont de plus en plus accès à une nouvelle classe de médicaments, appelés inhibiteurs de PARP, dit-elle. Lorsque les tests génétiques sont effectués peu de temps après le diagnostic, les patientes peuvent avoir accès plus rapidement au traitement le plus approprié. »

Les deux équipes espèrent que d’autres équipes désireuses de réduire les listes d’attente puissent à l’avenir utiliser le modèle interdisciplinaire décrit ci-dessus.

« Nous célébrerons bientôt le premier anniversaire de l’existence de notre projet, qui s’est avéré une solution gagnant-gagnant, conclut Evan Weber. Les patientes ont plus rapidement accès aux tests, les conseillers en génétique ont plus de temps pour s’occuper des cas complexes, et les oncologues peuvent offrir plus rapidement des soins de qualité. Ce projet est absolument fantastique. »

 

À propos du service de génétique du CUSM

La génétique est une profession de la santé, qui a connu une croissance phénoménale au fil des ans et qui s’applique maintenant à tous les domaines de la médecine, allant des maladies génétiques et des anomalies chromosomiques aux troubles cardiaques ou neurologiques. Au CUSM, une équipe multidisciplinaire travaille avec des patients de tous âges, de la vie prénatale à l’âge adulte, dans le but de diagnostiquer, de traiter et de prévenir les anomalies congénitales et les troubles héréditaires.

Composition de l’équipe :

12 médecins, 8 spécialistes de la génétique médicale, 1 endocrinologue, 2 pédiatres, 1 neurologue, 10 conseillers en génétique, 1 infirmière et 1 nutritionniste

Spécialités :

Génétique générale, biochimique et moléculaire

Quelques sous-spécialités :

Génétique pédiatrique générale, maladies héréditaires de la peau, neurofibromatose, cancer héréditaire, diagnostic prénatal, ophtalmologie, neurogénétique et génétique reproductive

Fait intéressant à savoir :

« Beaucoup de patients sont recommandés à notre département, mais nous ne recevons qu’entre trois et sept patients par jour; il faut procéder à des examens approfondis, et les services de conseil génétique destinés aux patients et aux membres de la famille nécessitent du temps », commente Lola Cartier, chef du service de génétique médicale.

Statistiques sur le cancer de l’ovaire 

  • Le cancer de l’ovaire représente 2,7 % de l’ensemble des cancers qui touchent les femmes 
  • Une femme sur 69 développe un cancer de l’ovaire au cours de sa vie 
  • Jusqu’à 20 % des cancers de l’ovaire sont héréditaires 
  • Le risque de développer un cancer de l’ovaire peut atteindre 44 % pour les femmes porteuses de la mutation BRCA