Les lignes directrices en matière de prise en charge de l'anaphylaxie chez les enfants doivent être mises à jour
Les lignes directrices en matière de traitement de l’anaphylaxie chez l'enfant, une réaction allergique soudaine et potentiellement mortelle, devraient être réevaluées selon une nouvelle étude canadienne publiée dans le Journal of Allergy and Clinical Immunology: In Practice.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont évalué les résultats cliniques d’un traitement contre l’anaphylaxie administré avant la consultation à l’hôpital et comprenant de l’épinéphrine, des antihistaminiques et des stéroïdes (comme la diphenhydramine, plus couramment connue sous son nom commercial, Benadryl).
L’étude, portant sur 3 500 patients, est la plus exhaustive du genre à avoir été publiée. Au total, 80 % des patients examinés étaient des enfants et des adolescents âgés de 1 à 17 ans.
« Nous avons découvert que les stéroïdes, qui font partie du plan de traitement pour la prise en charge de l’anaphylaxie, peuvent avoir une incidence défavorable pour le patient », déclare le chercheur d’AllerGen, le Dr Moshe Ben-Shoshan, spécialiste en allergie et immunologie pédiatrique à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR‑CUSM) et à l’Hôpital de Montréal pour enfants du CUSM.
Les chercheurs ont en effet découvert que les admissions à l’unité des soins intensifs ou à l’hôpital étaient presque trois fois plus nombreuses dans les cas où l’anaphylaxie avait été traitée avec des stéroïdes en milieu préhospitalier (c.-à-d. à la maison, à l’école ou en présence d’ambulanciers paramédicaux).
« Malgré le fait que nous ne puissions commenter l’utilisation de stéroïdes à l’urgence spécifiquement, nos résultats laissent entendre qu’il s’avère nécessaire de réévaluer leur rôle dans la prise en charge de l’anaphylaxie », ajoute le Dr Ben-Shoshan, qui est aussi professeur adjoint de pédiatrie à l’Université McGill.
L’étude fait également fait ressortir l’avantage associé à l’utilisation de l’épinéphrine pour la prise en charge de l’anaphylaxie, définie dans l’étude comme étant une réaction impliquant au moins deux systèmes de l’organisme et/ou une chute soudaine de la pression artérielle.
« Notre étude démontre, pour la première fois, que l’utilisation de l’épinéphrine en milieu préhospitalier a une incidence favorable importante sur la prise en charge clinique de l’anaphylaxie, explique l’auteure principale, Sofianne Gabrielli, stagiaire à AllerGen et associée de recherche à l’IR‑CUSM. Nous avons étudié l’utilisation de l’épinéphrine en combinaison avec des antihistaminiques; nous avons découvert que lorsque l’épinéphrine était administrée avant l’arrivée à l’hôpital, les patients étaient presque cinq fois moins susceptibles d’avoir besoin de se faire administrer plusieurs doses d’épinéphrine à l’Urgence pour maîtriser l’anaphylaxie. L’effet protecteur de l’épinéphrine était beaucoup plus important que celui des antihistaminiques. »
Les chercheurs ont analysé des données s’appliquant à la période comprise entre 2011 et 2017, provenant de neuf services d’urgence répartis dans cinq provinces canadiennes. Ces données ont été recueillies dans le cadre du projet pancanadien de registre de l’anaphylaxie (C‑Care) d’AllerGen, un projet dirigé par le Dr Ben‑Shoshan. Il s’agit de la première étude prospective sur l’anaphylaxie à évaluer le taux, les déclencheurs et la prise en charge de l’anaphylaxie dans diverses provinces et dans divers milieux du Canada.
Selon les chercheurs, les résultats décrits ci-dessus laissent entendre qu’il faudrait modifier les pratiques actuelles en matière de prise en charge de l’anaphylaxie, à tout le moins celles qui s’appliquent à l’environnement préhospitalier. Les modifications ainsi apportées devraient prévoir l’exclusion de l’administration de stéroïdes et ne recommander l’administration d’antihistaminiques qu’en combinaison avec de l’épinéphrine dans tous les cas d’anaphylaxie.
À propos des autres conclusions de l’étude
- Moins du tiers (31 %) des réactions anaphylactiques avaient été traitées avec de l’épinéphrine avant l’arrivée à l’hôpital. Des antihistaminiques avaient été administrés dans 46 % des cas, et des stéroïdes, dans 2 % des cas, dans l’environnement préhospitalier.
- La majeure partie des réactions anaphylactiques (79 %) étaient attribuables à un aliment, alors que, dans 5 % des cas, le déclencheur était un médicament et, dans 2 % des cas, il s’agissait de venin.
- Les déclencheurs les plus courants provoquant une anaphylaxie étaient les arachides (21 %), les noix (15 %), les œufs (7 %) et le lait (7 %).
- La majeure partie des réactions anaphylactiques (74 %) étaient moyennement sévères, et la maison était l’environnement préhospitalier où s’étaient produites le plus grand nombre de réactions allergiques (55 %).
« Il est préoccupant de constater que moins du tiers des réactions allergiques avaient été traitées avec un auto-injecteur d’épinéphrine avant l’arrivée à l’hôpital », ajoute Jennifer Gerdts, coauteure de l’étude et directrice générale d’Allergies Alimentaires Canada ̶ organisme caritatif à but non lucratif dont la mission est d’éduquer et de soutenir les Canadiens ayant des allergies alimentaires, de même que les personnes qui s’occupent de ces derniers, et de faire valoir leurs intérêts.
« Les résultats publiés aujourd’hui font ressortir la nécessité d’éduquer davantage le grand public et de lui insuffler la confiance nécessaire pour évaluer les signes et les symptômes de l’anaphylaxie, et pour traiter cette réaction allergique avec un auto-injecteur d’épinéphrine lorsqu’elle se manifeste. La campagne de sensibilisation « Give and Go » (en anglais seulement) que nous menons actuellement vise l’atteinte de cet objectif; toutefois, il faut déployer davantage d’efforts pour comprendre ce phénomène et pour pallier cette lacune importante. »
À propos d’AllerGen NCE Inc.
AllerGen NCE Inc., le Réseau des gènes, des allergies et de l’environnement (créé en 2004) est un réseau de recherche national qui se consacre à l’amélioration de la qualité de vie des personnes souffrant d’allergies et de maladies immunitaires apparentées. Financé par Industrie Canada dans le cadre du programme fédéral des Réseaux de centres d’excellence (RCE), le Réseau est logé à l’Université McMaster, à Hamilton. Visitez allergen-nce.ca pour un complément d’information.
À propos de l’Institut de recherche du CUSM
L’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) est un centre de recherche de réputation mondiale dans le domaine des sciences biomédicales et de la santé. L’Institut, qui est affilié à la faculté de médecine de l’Université McGill, est l’organe de recherche du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), situé à Montréal, au Canada, et qui offre des soins de santé complexes à la collectivité. L’IR‑CUSM compte plus de 460 chercheurs et près de 1 300 stagiaires de recherche qui se consacrent à divers secteurs de la recherche fondamentale, de la recherche clinique et de la recherche en santé évaluative aux sites Glen et Hôpital général de Montréal du CUSM. Ses installations de recherche offrent un environnement multidisciplinaire dynamique qui favorise la collaboration entre chercheurs et tire profit des découvertes destinées à améliorer la santé des patients tout au long de leur vie. L’IR‑CUSM est soutenu en partie par le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS). Visitezircusm.ca
Relations avec les médias | |
---|---|
Kim Wright |
Julie Robert |