Des essais cliniques prometteurs face à la menace persistante de la tuberculose
Des chercheurs de L’Institut font progresser la recherche de traitements préventifs contre la tuberculose multirésistante.
À Montréal, les cas de tuberculose ont augmenté de 54 % en 2024 par rapport à la moyenne de 2010 à 2023, selon un récent appel à la vigilance lancé par la Direction régionale de santé publique de Montréal. Un rappel que même dans les pays à faible incidence, la maladie demeure une menace importante, exacerbée par la tuberculose multirésistante (TB-MR).
Les résultats de l'essai clinique VQUIN MDR mené par une équipe de l’Université de Sydney en collaboration avec les chercheurs Dick Menzies, Marcel Behr, Andrea Benedetti et l’étudiant diplômé Ori Solomon de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (L’Institut) montrent que l’antibiotique lévofloxacine pourrait être utilisé en toute sécurité pour prévenir la tuberculose multirésistante. Ces résultats, récemment publiés dans le New England Journal of Medicine, offrent une lueur d’espoir pour enrayer la propagation de la tuberculose dans le monde.
« Causée par des bactéries résistantes à la rifampicine et à l’isoniazide — les médicaments couramment utilisés pour prévenir l’apparition de la maladie et la propagation de l’infection — la tuberculose multirésistante touche environ 400 000 personnes dans le monde chaque année, selon l’Organisation mondiale de la santé », déclare le Dr Marcel Behr, chercheur principal au sein du programme Maladies infectieuses et immunité en santé mondiale de L’Institut et directeur de la Division des maladies infectieuses du Centre universitaire de santé McGill. « Sans un traitement sûr et efficace, ces personnes peuvent voir leur état évoluer vers une maladie clinique et potentiellement transmettre ces formes résistantes à d’autres personnes. »
Cet essai, dirigé par Gregory Fox, directeur du Centre d'excellence pour la recherche sur la tuberculose du Conseil national australien de la santé et de la recherche médicale à l'université de Sydney, et appelé VQUIN MDR, était un essai contrôlé, randomisé et en double aveugle dans lequel les participants — des individus vivant avec des personnes infectées par la tuberculose multirésistante — ont reçu soit une dose orale quotidienne de lévofloxacine, soit un placebo, durant six mois. Mené dans dix provinces du Viêt Nam, un pays où le taux de tuberculose résistante aux médicaments est élevé, il a révélé que la lévofloxacine réduisait de 45 % le risque de développer la tuberculose multirésistante chez les adultes et les adolescents.
Au cours de la période de suivi de 30 mois, la tuberculose s’est développée chez six des 1 023 participants ayant reçu la lévofloxacine et chez 11 des 1 018 participants ayant reçu un placebo. Il y a eu peu de différence entre les deux groupes en ce qui concerne les effets indésirables graves, mais les effets indésirables légers ont été plus fréquents avec la lévofloxacine.
« L’étude a abordé une question importante : la sécurité à long terme de la prise de cet antibiotique, la lévofloxacine, pendant six mois. Heureusement, il a été bien toléré et n’a pas été associé à des effets indésirables majeurs », explique Ori Solomon, qui a séquencé les génomes des bactéries provenant de patients atteints de tuberculose multirésistante et de leurs contacts qui ont ensuite développé la tuberculose, afin de déterminer si de nouvelles mutations dans leurs souches avaient été induites par l’utilisation de l’antibiotique. « Nous n’avons pas trouvé de nouvelle résistance acquise à l’antibiotique. Dans l’ensemble, cela montre que le traitement est à la fois sûr pour le patient et qu’il présente un faible risque de favoriser la résistance aux antibiotiques dans la tuberculose. »
Bien que la lévofloxacine ait presque réduit de moitié le risque de tuberculose multirésistante dans l'essai, les auteurs de l’étude notent que la différence n’est pas statistiquement significative en soi. Ils expliquent toutefois que l’incidence de la tuberculose a également été réduite par la lévofloxacine dans une étude distincte et indépendante, appelée TB-CHAMP, réalisée en Afrique du Sud et publiée dans le même numéro du journal. Ensemble, ces deux études ont démontré que la lévofloxacine peut réduire le risque de tuberculose multirésistante chez les membres de la famille et les autres membres du foyer, réduisant ainsi l'impact mondial de ce dangereux agent pathogène.
En effet, comme souligné dans un éditorial du journal, une méta-analyse des données individuelles des deux essais « a montré que la lévofloxacine a entraîné une réduction relative d’environ 60 % de l’incidence cumulée de la tuberculose par rapport au placebo. »
Pour plus d'informations, lire le communiqué de presse.
À propos de l'étude
L'étude Levofloxacin for the Prevention of Multidrug-Resistant Tuberculosis in Vietnam a été menée par Greg J. Fox, Nguyen Viet Nhung, Nguyen Cam Binh, Nguyen Binh Hoa, Frances L. Garden, Andrea Benedetti, Pham Ngoc Yen, Nguyen Kim Cuong, Emily L. MacLean, Manisha Yapa, David W. Dowdy, Nguyen Huu Lan, Elyse Guevara-Rattray, Pham Duc Cuong, Ori Solomon, Marcel A. Behr, Ben J. Marais, Steven M. Graham, Dick Menzies, Nguyen Thu Anh et Guy B. Marks.
DOI: 10.1056/NEJMoa23143
L'essai VQUIN a été financé par le Conseil national australien de la santé et de la recherche médicale (NHMRC). Il a été parrainé par le Woolcock Institute of Medical Research et mis en œuvre en partenariat avec le Vietnam National Tuberculosis Program.